La Saint-Cyrienne a appris avec beaucoup de tristesse et d'émotions le décès du général Claude Le Borgne survenu le 15 janvier 2022. Elle présente ses très sincères condoléances à sa famille et tous ses frères d'armes.
En hommage à sa mémoire, nous mettons en ligne deux témoignages, le premier du général Dominique Delort, ancien président de La saint-Cyrienne, le second du général Vincent Desportes.
"C’est une grande tristesse. J’ai la plus grande estime et le plus grand respect pour lui. Il est une des plus riches personnalités d’une génération qui aura tout connu. Son intelligence exceptionnelle s’alliait à un humour que j’appréciais tout particulièrement. A l’écrit comme à l’oral il est resté tout au long de sa vie comme une exception où l’âge n’avait pas de prise. Son souvenir n’est pas prêt de s’estomper et je souhaite pour la France, de jeunes saint-cyriens d’une telle qualité et hauteur de vue."
Général de corps d’Armée Dominique Delort (67-69)
Président d’honneur de La Saint-Cyrienne
Extraits de l’allocution prononcée par le général Vincent Desportes lors de l’assemblée générale 2009 de La Saint-Cyrienne :
Lorsque l’on m’a demandé de prononcer l’allocution qui précèderait, devant cette assemblée, la remise au général Claude Le Borgne d’un prix exceptionnel venant saluer son remarquable parcours d’homme de plume, je n’ai naturellement pas hésité.
Je n’ai pas hésité parce que j’ai une véritable admiration personnelle pour le général Le Borgne. Parce que le général Le Borgne est un soldat, un vrai qui a passé une grande partie de sa vie en opérations, et parce que le général Le Borgne est un soldat qui écrit.
C’est un soldat qui écrit, mais qui écrit avec la force de son caractère et de son intelligence, c’est-à-dire de manière lumineusement critique, sans hésiter à se placer à rebours des courants dominants et en apportant un autre regard, une compréhension nouvelle des circonstances et des événements.
Pour de multiples raisons nous manquons, je parle de la France, nous manquons de généraux Le Borgne et nous en manquons depuis longtemps, depuis trop longtemps.
Au bilan, la légitimité de la parole des militaires au milieu de la nation s’est effacée, et le militaire s’est progressivement trop cantonné dans un rôle technique où beaucoup sont très heureux de le voir maintenu. Mais la nation et l’Etat ont besoin de l’expression de ce corps qui est un des piliers indispensables de la nation – qui est même historiquement la seule justification de l’existence du second, de l’Etat. La nation est l’Etat ont besoin de l’expression des militaires parce que les militaires, en raison de la façon dont se construisent progressivement leurs esprits, sont un des rares corps de l’Etat à avoir naturellement une pensée de nature stratégique, une pensée englobante.
Certaines autorités intellectuelles estiment que si les XIXème et le XXème siècle ont été les siècles des diplomates, le XXI pourrait bien être celui des soldats puisque, les relations entre Etats ayant été apaisées, la guerre est venue se placer au cœur des Etats et des nations, là où le soldat endosse un rôle central, directement politique.
Il faut donc que les militaires soient entendus. Mais pour être entendus, il faut qu’ils s’expriment et qu’ils aient, du haut de leur expérience et de leur intelligence, quelque chose à dire.
Mon général vous aviez quelque chose à dire et vous l’avez dit.
Récemment vous avez pris plusieurs fois la parole et l’écrit, avec votre intelligence caustique, pour critiquer ce que je disais ou ce que j’écrivais moi-même. Je vous en suis reconnaissant, d’abord parce que vous m’avez fait progresser par ces questionnements, et parce que le débat est surement le meilleur lieu pour le développement de la pensée. Et je suis d’autant plus honoré d’avoir à prononcer ce matin cette courte allocution.
Vous avez commencé dans les années 1970 par des publications dans la revue de la défense nationale. Vous avez poursuivi par la publication de nombreux romans et essais portant toujours, au fond, sur la stratégie.
N’en déplaise au général Le Borgne, les militaires n’exècrent pas tous les hommes de plume et l’hommage que nous lui rendons aujourd’hui en est la preuve.
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